Réparation d’une immense injustice, connaitre enfin notre premier champion du monde de voile (Exclusivité)
En 1967 un français monte sur la plus haute marche du podium du championnat du Monde - Classe Europe. La voile française fait enfin retentir pour la première fois la Marseillaise. L’auteur de cet exploit historique est Michel Lambot. Je suis allé sur la toile pour mieux connaitre ce champion hors pair qui a ouvert la voie à tant de champions français et là, je n’ai rien trouvé, Michel Lambot, notre premier champion du monde, n’a pas une ligne sur internet, pas la moindre photo de lui sur la page image de Google qui est pourtant bien fournie en portraits d’illustres inconnus du même nom.
J’ai donc décidé de réparer cette injustice en vous offrant, comme cadeau de Noël, de rencontrer Michel à la terrasse d’un café du port de Santa Lucia à St Raphaël.
C’est un homme fluet, discret et affable qui s’assoit en face de moi. La mémoire vivante d’une partie de notre patrimoine marin est en quelques secondes un « amis ».
- « Il n’y a pas grand-chose à dire, juste que j’ai eu de la chance, rien d’extraordinaire. »
Résumé comme cela, il n’y aurait en fait rien d’extraordinaire à ce qu’il soit aujourd’hui oublié, mais en fait…
En 1967, pour le championnat du monde, il se rend à Ostende (Belgique) à ses frais avec un « Moth » prêté par le chantier Deschamps. Il n’a jamais navigué en mer du nord, et à peine en Atlantique, il ne connait rien au phénomène des marées. Son terrain de jeux a toujours été la Méditerranée.
Lors de la première manche il finit 60ème sur 80 partants,
- « J’étais dans la panade, je ne comprenais rien au comportement du bateau, c’était une catastrophe »
Un grand sourire et,
- « J’ai passé la nuit à étudier les marées les courants et mes adversaires, 60ème, je partais avec un gros handicap »
Le lendemain il apprend que la manche de la veille à été annulée pour des irrégularités (la partie « chance » du champion). Michel n’a pas laissé passer cette chance et de plus il apprend vite, vraiment très vite.
2ème manche : 30ème ; 3ème manche : 2ème ; 4ème manche : 2ème ; 5ème manche : 2ème ; 6ème et dernière manche : Vainqueur et Champion du monde.
Après ce fait d’arme Michel me raconte un peu sa vie.
Il est né en 1943 et a toujours vécu à St Raphaël. Son père navigue sur un « Dragon » et Michel veut son propre bateau. A 12 ans on lui offre les plans d’un « Farfadet » (l’ancêtre de « l’Optimiste »). Dans l’enthousiasme, il le construit dans sa chambre, découpant le contreplaqué sur son lit et collant les bouchains sur le plancher. La fureur de toute la parentèle a atteint son paroxysme quand il a fallu casser le mur pour sortir le bateau. Mais le majestueux esquif est enfin à l’eau.
Michel rêve de régates, de confrontations et compétitions, son père lui offre, quatre ans plus tard, un « Ponant » (évolution du 505) de chez Deschamps. C’est là sont premier contact avec le constructeur.
Cet été là, Michel écume les compétitions. C’est avec une fierté, curieusement plus perceptible que pour sa médaille d’or aux mondiaux, qu’il me confit :
- « Au cours de cet été j’ai régaté tous les jours et j’ai ramené une coupe tous les jours, les autres disaient, si on veut gagner il faut que Lambot ne soit pas au départ. »
Cette hégémonie dura trois été de plus.
A la « Semaine de La Rochelle » Deschamps venait de sortir son Moth avec mât en polyester. Impressionné par les exploits de Michel avec le Ponant, il lui demande d’essayer sa nouvelle monture et de participer à l’épreuve internationale de la classe qui réuni les meilleurs mondiaux.
- « Je n’étais pas très chaud, je ne connaissais ni la série, ni le bateau, il a fallu qu’on m’aide pour savoir dans quel sens on enfilait la dérive sabre, mais Deschamps m’a dit que c’était pour avoir mon avis…»
Michel remporta la 1ère manche et l’épreuve à sa grande surprise. La suite c’est une médaille d’or aux championnats de France et la consécration aux championnats du monde. Il est appelé et fait son service militaire au bataillon de Joinville pour accumuler quelques breloques de plus.
Une célébrité précaire lui permettra de faire faire les premiers pas de marin à des stars d’hier et d’aujourd’hui, Antoine lui doit ses premières sensations de bardeur et son premier dessalage, Sheila son premier tour en bateau.
Il restera amis jusqu’au bout avec Eric Tabarly. Il va créer un Chantier naval sur le port de St Raphaël qu’il revendra pour prendre un pré retraite en 1987.
Ou que tu sois aujourd’hui, Michel, merci et bon vent.
PG