Los Testigos : Avant le paradis, les pirates et le GPS fou - 1° partie

16-10-2013 00:00:00

 

Début juin : début officiel de la saison cyclonique, il est temps pour nous de sortir de la zone exposée…d’autant plus que les ondes tropicales commencent à se succéder en Martinique, où nous nous sommes arrêtés –fidèles à nos engouements !-  en redescendant l’arc antillais. Tuamitoo pointe son étrave à 10 mètres de la plage de Grande Anse d’Arlet, face à nos amis de Plongée Passion, un dernier coup de trompe pour dire au revoir, et direction….nous ne le savons pas encore, notre décision n’est pas encore  prise ! Directement aux Testigos –le premier archipel vénézuelien- ou d’abord les Grenadines ? Discussions, hésitations, tergiversations, consultation de la météo…cap direct sur les Testigos où nous pourrons ainsi passer plus de temps avant notre retour en France. Nous sommes partis pour une arrivée le surlendemain au petit jour. Les conditions météo sont superbes, Tuamitoo file sous voiles, vite, trop vite même car à ce rythme nous risquons d’arriver de nuit ; et ce n’est pas recommandé du tout dans cette zone où les cartes sont assez peu fiables…gare aux écueils ! Nous réduirons d’ailleurs sensiblement la voilure au cours de la dernière nuit, pour arriver avec les premiers rayons du soleil.

 

Les rumeurs d’agression au Vénézuela se font de plus en plus fréquentes, et beaucoup de bateaux ont renoncé à naviguer seuls en direction de ce pays

Une appréhension latente nous empêche cependant de profiter pleinement de cette navigation idéale. Les rumeurs d’agression au Vénézuela se font de plus en plus fréquentes, et beaucoup de bateaux ont renoncé à naviguer seuls en direction de ce pays. Mêmes aux Testigos, réputées très sures jusqu’à cette année, une agression a eu lieu en février, faisant un blessé grave par balles. Là, je vous surprends à penser très fort « mais alors, pourquoi y vont-ils ? » !!!!! Parce que, aux dires de la plupart des bateaux qui connaissent, c’est très beau (et en particulier tous les archipels vénézueliens ), parce que c’est hors zone cyclonique (théoriquement en tout cas !), parce que le climat y est beaucoup plus sec et sain qu’à Trinidad pour y laisser le bateau (l’expérience cuisante de Trinidad est encore fraîche),  parce que la vie y est peu chère compte tenu des taux de change au marché noir (il faut simplement faire attention aux arnaques !)…parce que nous sommes curieux, tout simplement !

La première nuit se passe sans encombre; par précaution, nous naviguons tous feux éteints, ce qui nous oblige à une plus grande vigilance encore, car nous ne sommes pas visibles des autres bateaux (en tout cas de ceux qui n’ont pas de radar). A la lumière du jour, la tension se relâche. Nous sommes sous voiles, confortablement installés à l’avant du bateau, le pilote automatique barre, lorsqu’ apparaît à l’horizon une embarcation. Nos trajectoires ne se croisent visiblement pas, et nous la regardons sereinement aux jumelles, intéressés par un des rares événements de la journée : c’est une  « lancha » –un bateau de pêche- . Soudain, une vraie inquiétude nous saisit lorsque celle-ci change brutalement de cap et se dirige droit sur nous. Jean-Philippe se rue à l’arrière du bateau, dans le cockpit, et démarre instantanément les deux moteurs, pour accélérer l’allure. La lancha se rapproche malgré tout, la tension monte, et nous poussons les manettes des gaz plus loin qu’elles n’ont jamais été. Les moteurs fument et sentent le brûlé sous l’effet du surrégime, mais Tuamitoo prend petit à petit de la vitesse…l’écart qui nous sépare de notre poursuivant se stabilise enfin et…ouf ! Il finit par abandonner, sa silhouette rétrécit progressivement, en même temps que le soulagement se peint sur nos visages. Parano ou réalité ? Après tout, peut-être voulait-il simplement nous saluer, ou nous demander une bière ou un coca frais, ou nous donner du poisson ? Une manière de se rassurer rétrospectivement …La grande question de l’arme à bord, de celles qui divisent fortement les navigateurs au long cours, se pose encore une fois à nous. Elle se posera de nouveau lorsque quelques semaines plus tard deux incidents auront lieu à Margarita, dont un dans le mouillage où nous nous trouvons, parmi plusieurs dizaines d’autres bateaux ! La tombée de la nuit –un moment que d’habitude nous n’apprécions guère- nous rassérène. Sans feux, nous sommes invisibles, et c’est finalement plus rassurant de naviguer la nuit dans ce contexte.

Touamitoo aux moteurs

 

Il m’explique alors que selon la carte et notre position GPS, nous devrions voir les Testigos à bâbord ; or elles sont effectivement à tribord…

Tout se passe bien. Nos quarts se succèdent, et à 4 heures 30, juste avant le lever du jour, je passe pour la dernière fois le relais à Jean-Philippe. Rien de particulier à signaler, sauf  que le bateau est un peu dérouté par une dérive latérale très forte et que j’ai eu beaucoup de mal à compenser en modifiant substantiellement le cap. Je descends me coucher, et au moment où je sombre avec volupté dans le sommeil, Jean-Philippe fait irruption dans la cabine : « Ari, viens voir ! ». En grommelant (et en pensant qu’il a intérêt à avoir une très bonne raison de me tirer du lit !), je monte sur le pont, où tout parait serein. « Qu’est-ce que tu vois là ? C’est des îles ou des nuages ? »De toute évidence, ce sont des îles, les Testigos ; je reste interloquée quelques secondes par la question en me disant que Jean-Philippe a du mal dormir cette nuit, qu’il est sans doute très fatigué…Il m’explique alors que selon la carte et notre position GPS, nous devrions voir les Testigos à bâbord ; or elles sont effectivement à tribord…Nous sortons le second GPS, pensant que le premier a un problème…même position.Bon, mais ce ne peuvent être quelles, il n’y a pas le moindre autre îlot à des miles à la ronde. Nous adaptons donc notre cap, sans toutefois comprendre ce qui se passe, et tout en se félicitant chaudement d’être arrivés de jour ! Nous abordons les îles à vue, et trouvons la passe d’entrée sans difficultés.

Ce n’est que plus tard, après réflexion et surtout après quelques heures de sommeil, que nous avons compris que Tuamitoo était soumis à un courant latéral tellement fort qu’il « marchait en crabe » pour maintenir le cap ; notre proue était en effet décalée de plus de 90° par rapport au cap que nous suivions réellement ! Naturellement, notre angle de vision des îles était décalé d’autant…les faisant passer de bâbord à tribord !

Ariane

 

Photos

http://eolis3.blogspot.fr/2006_04_01_archive.html

http://ninamu.over-blog.com/article-los-roques-clandestinos-100151808.html

Gaêlle 

 



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