Los Testigos : Après les pirates et le GPS fou enfin le paradis -2° partie

24-10-2013 00:00:00

Un monde de pêcheurs : filets, barques et pélicans goulus…Et au pied de la petite île en face, des « HLM » de langoustes à moins de 2 mètres de fond!

 

Nous entrons dans la passe pour découvrir à bâbord, sur Testigo Pequeño,  le premier mouillage de Playa Real : magnifique ! Mais malheureusement désert….compte tenu des rumeurs, pas question de poser l’ancre ici. Et si aucun plaisancier n’était en ce moment aux Testigos ? Que faisons-nous ? Nous nous arrêtons ? Nous passons notre chemin ? Vous imaginez  dans quel état de méfiance nous sommes…Mais la question ne se posera pas longtemps, car nous trouvons quelques minutes plus tard, au mouillage suivant, sur Testigo Grande 3 autres voiliers au mouillage….nous sommes donc 4 en tout pour l’instant dans l’archipel et d’autres compagnons arriverons dans la journée. Le mouillage d’Iguana, l’île en face de nous est également vide de voilier, seulement quelques « peñeros »- des barques- et lanchas. Un peu « cuits » par nos deux nuits de quart, nous ne débarquerons pas aujourd’hui ; nous profitons seulement des eaux turquoise. Le lendemain, il faut quand même se soumettre aux éternelles formalités, dans les faits simplement aller se faire enregistrer auprès de la Guarda Costa  car dans l’archipel on ne peut pas faire d’entrée officielle au Vénézuela. Le bureau est à Cubagua, l’île en face; nous traversons la passe en annexe, en se faisant copieusement arroser au passage. Les gardes-côtes sont très aimables, mais nous apprenons que le séjour toléré n’est que de trois jours lorsque l’entrée officielle dans le pays n’est pas effectuée. Consternation ! Nous négocions sans trop de difficultés le droit de rester 5 jours, en pensant que nous trouverons une bonne excuse pour obtenir ensuite quelques jours supplémentaires. En réalité nous resterons 15 jours ici ! A la fin de notre séjour, les gardes-côtes, qui patrouillent quasi quotidiennement dans les mouillages, viennent nous dire bonjour, boire une bière à bord, évoquer la fête que nous avons fait la veille avec les locaux (l’archipel est tout petit, tout le monde se connaît), mais ne nous demandent même plus quand nous partons ! A la clé, un peu d’attention à leur égard, un DVD en espagnol pour les distraire, et quelques bières…C’est le changement d’équipe qui nous décide finalement à partir, car tout serait alors à renégocier !

 

Le soir même, nous entrons de plein pied dans la vie locale, et nous n’en émergerons plus pendant 15 jours, conquis par l’hospitalité, la générosité, la gentillesse, la joie de vivre des familles de pêcheurs (c’est l’unique activité de l’archipel) qui habitent ici. Ils n’auront de cesse de nous faire découvrir leurs îles, et de nous en faire goûter tous les plaisirs. La « sauce pendra d’autant mieux » qu’un courant de sympathie passe également très vitre entre quelques uns des voiliers qui sont là….ceux qui comme nous « prendrons racine » aux Testigos …ou plutôt qui ferons un élevage d’algues et de coquillage sous leur bateau !

 

Tout est simple ici : pas de routes, pas de voitures, pas de vélos même ! Les quelques habitations sont concentrées au bord de trois plages (les seuls 3 mouillages de l’archipel) et l’unique moyen de déplacement –l’outil de travail principal aussi- est le bateau. Nous voyons d’ailleurs chaque matin la barque « transporte escolar » qui vient chercher les quelques enfants de Testigo Grande pour les emmener à Cubagua, où se trouve l’école. En fait, les Testigos ne sont habitées de manière permanente que depuis quelques décennies (2 ou 3 générations). Auparavant, les pêcheurs y établissaient des campements temporaires, le temps d’une campagne de pêche.

Les plages où viennent pondre les tortues. A l’horizon, on aperçoit le continent vénézuelien : une des parties de la côte les plus atteintes par la délinquance et le piratage.

 

Première fête ce soir, chez Benjamin : il a mis sa « maison » sur la plage et ses quelques sièges de récupération à notre disposition : chacun amène de quoi manger et boire, et Benjamin nous régale de quelques poissons cuits au barbecue. Comme chaque fois, la soirée se termine en chansons, autour des joueurs de guitare, et en particulier de la « quatro cuerdos », spécifique du Vénézuela. Les grivoiseries vont également bon train ! C’est apparemment une forme d’humour très développée au Vénézuela, et plus encore sans doute ici où les femmes sont nettement moins nombreuses que les hommes…. ! Cette même nuit, nous irons voir pondre les tortues vertes et les tortues luth (une espèce protégée car en voie d’extinction) sur une des plages de la côte au vent. Un spectacle profondément émouvant : ces énormes tortues (les plus grandes mesurent plus de 2 mètres et pèsent près de 500 kg) remontent la plage sur 50 ou 100 mètres, en se tractant péniblement avec leurs grandes nageoires avant ; à l’emplacement choisi, elles creusent sur 80 cm environ, puis pondent une centaine d’œufs blancs et mous ; elles rebouchent alors le nid avec un soin fascinant : des nageoires avant elles poussent le sable en arrière, puis l’aplatissent et le tassent avec leurs nageoires arrière ; elles décrivent ensuite plusieurs cercles au dessus du nid afin de la camoufler avant de rejoindre plus ou moins directement l’eau. Tout cela, la « procédure » normale, nous ne le savons pas cette nuit là ; aussi,  lorsque la tortue se met à tourner en rond, après avoir bouché le trou -en poussant force grognements et soupirs à fendre l’âme-, nous sommes persuadés que nous l’avons désorientée avec nos torches et nos appareils photos, en dépit de toutes les précautions que nous avons prises…que faire ? La porter ? Bien utopique compte tenu des 400 ou 500 kg qu’elle pèse, et en plus trop interventionniste. L’attirer vers l’eau avec nos lumières (il semble qu’elles retrouvent la mer à la clarté blanche de l’écume)? Nous essayons, sans grand succès… Nous culpabilisons malgré l’intense émotion de ces moments. Enfin, elle finit par prendre la direction de la mer, non sans faire un dernier détour, qui annihile momentanément tous nos espoirs ! Quel soulagement, quelle joie, quelle émotion –petite larme au coin de l’œil-, lorsqu’elle touche l’eau, passe les petits rouleaux, et s’élance vers le large, retrouvant toute son agilité et sa grâce avec la mer. Tous ces énormes efforts pour des chances d’éclosion et de survie des bébés bien minces ! L’homme aime les œufs de tortue (aphrodisiaques parait-il)  et les frégates, fous, mouettes, crabes et autres prédateurs marins de laissent guère d’espoir aux petites tortues d’atteindre l’eau et d’y survivre. Les rares rescapées viendront pondre à leur tour sur la plage même qui les a vu naître. Joli, non ?

Naîfs comme nous étions, nous avons pensé que ses yeux pleuraient pour rester humides…ou pour les plus sensibles parce qu’elle souffrait!  Vérification faite, c’est un processus d’élimination du sel qu’elle absorbe

 

Benjamin sera aussi notre premier initiateur (celui de Jean-Philippe plus précisément car il n’accepte d’emmener que les hommes !!!) à la pêche à la langouste ; le seul voyage en annexe pour y aller constitue une aventure que Jean-Philippe et Laurent (un ami d’un autre bateau, et propriétaire de l’annexe) ne sont pas près d’oublier : creux de 2 ou 3 mètres dans une mer très courte et désordonnée  -le petit dinghy fait des bonds sur les vagues-, panne d’essence à quelques mètres des rochers, passes étroites, agitées de forts courants, peu profondes….mais à la sortie une dizaine de langoustes que nous dégusterons le soir même…Le lendemain, jour de la fête des pères, Benjamin nous convie au « village » :dépeçage des chèvres chassées au petit matin et que nous dégusterons dans un excellent ragoût le soir même, combats de coqs, jeux de dominos, jeux de cartes, et dizaines de litres de bière (elle vaut moins cher que l’eau minérale au Vénézuela !) rythment cette journée de fête.

C’est seulement quelques jours plus tard que nous rencontrerons ‘Chon chon » (el señor Chon chon comme l’appellent respectueusement les gardes côtes), une légende parmi les gens de bateau. Depuis des années, son hospitalité, son humour, ses talents de conteur (beaucoup sont repartis en croyant dur comme fer à des histoires inventées de toutes pièces !), son sens de la fête rendent l’escale aux Testigos inoubliable (pour ceux en tous cas qui savent entrer en contact  au bon diapason avec les habitants). Jacques Brel, Florence Arthaud, Laurent Bourgnon….sont passés ici; mais l’accueil est le même pour tous, sincère, chaleureux, généreux, désintéressé. Nous mangeons à nouveau une chèvre tuée au fusil pompe (les chèvres vivent en liberté, semi sauvages), et cuisinée par Chon chon au court d’une soirée de fête mémorable : rires, musique, chants, danse…

Nelly,l’ex-femme de Chon chon,une figure des lieux elle aussi, nous accueille à son tour pour un barbecue de langoustes, pêchées l’après-midi même en compagnie des fils, cousins, amis…et là les femmes étaient admises ! Chon chon et deux de ses fils –Joche et Feliz- nous ferons le plaisir d’un  « récital » de chansons traditionnelles accompagnées aux guitares.

Et chaque jour ou presque, l’un ou l’autre nous propose de venir à la pêche aux requins, de poser ou relever lignes et filets, de les accompagner dans une de leurs activités quotidiennes.

Grands sourires et bonne pêche : sur un requin, les ailerons rapportent à eux seuls autant que toute la chair!  Au milieu, un requin marteau, réputé parmi les plus dangereux avec le requin tigre.

 

 

Elle est loin  notre appréhension de l’arrivée aux Testigos !

Merci à Chon chon, Nelly, Joche, Feliz, Benjamin, Manolo….et tous les autres habitants de l’archipel, merci à Françoise et Jean-Pierre (de très vieux habitués des Testigos), à Patrick, à Barbara et Laurent, ….merci à la gentillesse des gardes côtes aussi…tous ont contribués à rendre ces quinze jours exceptionnels.

 

Texte est photos Ariane

 

 

 

Ariane TESTIGOS 0

Premier mouillage désert…nous ne prenons pas le risque de nous y arrêter. Et pourtant, si nous savions!  C’est la Playa Real à Testigo Pequeno, là où habite Chon Chon. Nous y passerons plus tard des journées magnifiques!

 

 

Ariane TESTIGOS 1

Nous mouillons finalement à Tamarindo, sur Testigo Grande, en face de chez Benjamin. L’île en face, c’est Cubagua, où se trouve le bureau de la Guarda Costa.

 

Ariane TESTIGOS 2

La plage de Tamarindo. Les containers bleus de part et d’autre de la maison sont des récupérateurs d’eau : la seule source d’eau de l’île…on comprend qu’ils ne boivent que de la bière!

 

 

Ariane TESTIGOS 4

Dans les filets, plusieurs tonnes de petites bonites qui attendent acquéreurs venus du continent ou même des îles antillaises.

 

 

Coraux cornes d’élans

 

 

Et si on se rapproche un peu, qu’est-ce que l’on trouve ? Il y en a au moins quatre visibles, et j’en dénombrerai  finalement au moins sept!

 

 

Tortue luth (sa carapace est faite de longues bandes qui ressemblent à du cuir), en phase de rebouchage après la ponte.

 

 

Les surnoms s’attrapent très facilement aux Testigos, et Jean-Philippe a vite été appelé le pélican, car ceux-ci ont le dessus de la tête blanche. D’ailleurs, la communication a été assez vite établie entre congénères

 

 

Joche nous a appris a poser le filet que nous avons en cale depuis 4 ans, sans l’avoir jamais sorti : belle prise pour une première, cette raie léopard!

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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